Le fil du Tyrol en rando alpine

D’Obergurgl à Dobbiaco

Trois semaines d’une longue tyrolienne, plein ciel, des Stubaï aux Dolomites.

19 jours

13 km/jour

950 m dénivelé / jour

Au fil des jours

Montagne qui rit, montagne qui pleure.                Vagabonder, déambuler, baguenauder dans l’Alpe. Voici ce que nous avons fait sur la frontière entre Italie et Autriche durant plus de trois semaines. Dans ces hautes montagnes tyroliennes, nous n’avons pas croisé de Français. Stubaï, Zillertal, Hohe Tauern, sont proches et vraiment lointaines. Le Fil de l’Europe nous emmène toujours vers du grand et du beau. Des sommets germaniques imprononçables, souvent glaciaires, faits de schistes, gneiss, roches métamorphiques et sédimentaires. Des champs de cailloux, de mélèzes, de foin coupé. Des refuges en vieux bois, « tavaillonnés » à souhait, nous ont accueillis à la tireuse à bière. Beaucoup de chaleur. « You are Frédéric, the French» et hop une grappa de bienvenue. Des amis qui viennent, repartent, se remplacent. Merci pour tant de gratitude.

Nous avons chaussé les crampons, suivi quelques câbles, monté souvent et désescaladé. Surtout posé un pied devant l’autre. Quel bonheur dans cette agilité à marcher au pas régulier. Semelles fortement appuyées, l’esprit libre de rêvasser, les yeux sur les moindres platitudes. Juste troublés par quelques rares jours de repos dans le Tyrol des vallées montagneuses où tout à coup nous retrouvions la frénésie des vacanciers, de la consommation, du confort et des bouchons !

Et pourtant, et pourtant… En marchant les yeux braqués vers le haut, j’ai regardé des glaciers agonisants, une terre qui avait soif du manque de vie. Nous avons vu peu d’oiseaux et de faune en plus de trois semaines. Un chamois, trois bouquetins, de rares marmottes, le cri apeuré d’un casse-noix tacheté, une compagnie de lagopèdes. Partout la nature en replis.

Intérieurement, j’étais et je suis très en colère. En 1990, le GIEC annonçait déjà ce risque majeur de sécheresse estivale sans retour en arrière possible. Nous sommes nombreux à avoir alerté qu’il s’agissait du plus grand défi de l’humanité. Depuis ce risque n’a cessé de se préciser. Les rapports alarmistes des scientifiques se sont succédés. Ce qui est en crise, avant même la gestion de la pénurie de cet été, c’est notre aptitude à correctement anticiper une situation qui n’était pas du ressort du « peut-être », mais que nous savions inéluctable. La politique est l’art d’anticiper, pas de résoudre seulement des problèmes urgents. La vieille fable de la cigale et de la fourmi reste d’une actualité déconcertante. Et il ne suffit pas de chanter ou danser pour faire venir la pluie.

Les alpinistes le voient avec beaucoup plus d’acuité que ceux de la vallée, car le constat est devant leurs yeux. Peut-être +1.5°C à l’échelle de la France… mais plutôt +4°C en plaine et +8 à 10°C en montagne actuellement en Europe, comme l’an passé à Vancouver et au Groenland ! Je suis assommé d’être entouré de personnes qui ne croient pas à la parole des scientifiques, mais font confiance aux populistes, conservateurs, dictateurs, complotistes ou religieux de tout poil. Comment peut-on être encore climato sceptique, anti-vax, anti véhicules électriques, pro croissance et pétrole à tout prix…face à la réalité prouvée scientifiquement des faits ! Comme les problèmes de l’énergie qui semblent nous « prendre au dépourvu » alors qu’il était possible de les voir arriver de loin, il y a besoin d’un plan massif pour réorienter l’économie vers une décarbonation tous azimuts. Et garder aussi en tête que, malheureusement, à cause de l’inertie du système climatique et des sociétés humaines qui émettent, l’avenir risque de nous réserver bien pire que la situation actuelle. Ces plans existent : The Shift Project, Haut Conseil pour le Climat, GIEC en publient régulièrement, la Convention Citoyenne en France a aussi préconisé des mesures en vain… Des initiatives se multiplient : des Team for the Planet, des pépinières d’initiatives écologiques, des réformes des écoles des mines, d’agro, de commerce… Mais quelle inertie fautive dans ma génération ! Heureusement je vois dans l’école de management de Lyon et les associations où j’interviens, beaucoup de consciences qui bougent, des futurs cadres « remontés », des Greta qui se mobilisent totalement… Alors je pense à eux en regardant « mes » montagnes asséchées. Pourvu qu’ils deviennent vite nos futurs décideurs !

Là-haut et cette fois, il y avait heureusement beaucoup de bonheur, des yeux pétillants de joie, des appréhensions vaincus dans notre équipe de transhumants. La montagne, les glaciers, la biodiversité souffraient, mais la beauté des lieux masquait notre insouciance. De sommet en sommet, la vue était immense, les lignes fuyaient, les sensations toujours là, les chalets en fleur, les nuages se noyaient dans les alpages. Alors en dégustant un « kaiserschmarren », le gâteau de l’Empereur, une bière à la main, les regards de notre petite tribu éphémère tournés vers les Dolomites au soleil couchant, je me suis mis à imaginer un nouveau monde bouleversé, mais apaisé pour mes enfants et petits-enfants. Et dans un coin de montagne, j’ai crié de toutes mes forces pour libérer ma fureur et me donner le courage d’agir !

  • Difficulté 50% 50%
  • Hébergement – Confort 70% 70%

En terrasse, dos endolori de cette belle journée en altitude, les yeux tournés vers les montagnes au couchant, un gâteau de l’Empereur partagé, des pintes, le Tyrol nous a offert la plénitude des treks au long cours.

Le point de vue de Dominique, Philippe, Chantal et Claude.

Détails du parcours

Grand trek au coeur de l’Europe, mêlant randonnée, passages glaciaires et via ferrata. Paysages de haute montagne et de vallées rurales du Tyrol autrichien ou italien selon les versants nord ou sud empruntés. Ce trek de 3 semaines fait mi-juillet mi-août parcourt des massifs où les Français sont rares: Stubaï, Zillertal et sud du Hohe Tauern (Rieserferner). Il cumule 240 km et 18 000 m de dénivelé (moyenne 13 km et 950 m par jour, mais certaines étapes sont longues)

J1 / J174  Obergurgl – Moso In Passiria
14 km    1000 m
 Départ: train et bus possible pour rejoindre Obergurgl, sinon hôtel haus Aktiv ou autres dans la station plutôt fermée en été. Arrivée: Albergo Hochfirst à Moso In Passiria (sur la route venant du col)

J2 / J175 Moso In Passiria – Hofmannspitze 3110m – Müller Hutte
13 km    1550 m. Passage sur glacier pour atteindre le Müller hutte à 3150m.
  Müller hutte

J3 / J176  Müller hutte – Magdeburger Scharte 3110m – Magdeburger hutte
14 km    800 m Etape difficile et longue, passages glaciaires crevassés, via ferrata, portion en terrain instable et itinéraire à trouver. Il faut du beau temps. L’étape peut éventuellement se scinder en deux en couchant au Teplitzer hutte.
  Magdeburger hutte

J4 / J177 Magdeburger hutte – Weisswand sptize 3020m – Tribulaunhaus
10 km    800 m Changement de décor dolomitique.
  Tribulaunhaus. Attention refuge côté autrichien. Il existe aussi côté italien un Tribulaunhaus!!!

J5 / J178 Tribulaunhaus – Schwarze wand 2920m – Gereit Obernberg
13 km     1020 m
  Almi’s Berghotel à Obernberg

J6 / J179 Gereit Obernberg – Sattelbergalm Brenner
15 km    1000 m
  Sattelbergalm à l’alpage de Sattelberg

J7 / J180 Sattelbergalm – Brenner pass – Europa hutte
11,5 km    1420 m
  Europa hutte

J8 / J181 Europa hutte – San Giacomo
 9 km    20 m
  Le refuge Pfitscher Joch haus étant plein, nous sommes descendus à San Giacomo, puis bus jusqu’à Vipiteno (vieux centre très sympa). Nuit à l’hôtel Zur Traube, douche, ravitaillement, navettes voitures et bus.

J9 / J182 San Giacomo – Pfitscher Joch 2250m – Furtschaglhaus
18 km    1320 m
  Furtschaglhaus

J10 / J183 Furtschaghaus – Schonbichler horn 3130m – Berliner hutte
9 km    820 m Via ferrata au niveau du Schonbichler.
  Berliner hutte, immense et traditionnel, vaut le détour. 

J11 / J184  Berliner hutte – Schwarzenstein 3300m – Schwarzenstein hutte
10,5 km    1300 m Etape en partie sur glacier avec approche à ne pas faire sans visibilité.  Initialement  nous devions poursuivre dans le Zillertal par Greizer et Kasseler hutte, mais les conditions étaient mauvaises pour le retour sur l’Italie (trace estimative sur la carte), nous avons donc coupé plus directement.
 Schwarzenstein hutte. Refuge ultra moderne, type Mordor du seigneur des anneaux… Très demandé, réservation indispensable et difficile en haute saison. 

J12 / J185 Schwarzenstein hutte – San Giovanni Aurina
9 km     50 m. Longue descente 2000m avec cables au départ.
  Bus jusqu’à Campo Tures, hôtel Alpinum. Douche, ravitaillement, navettes voitures et bus.

J13 / J186  San Giovanni – Gotsch in Aurina
15,5 km    750 m Belle étape de vallée dans le haut Adige (sud Tyrol)
  Bus pour rejoindre l’hôtel Steinhauswirt à Cadipietra.

J14 / J187 Gotsch in Aurina – Bretterscharte 2517m – Rein in Taufers
14 km    1200 m
  Hôtel Pichlerhof à Rein in Taufers (Riva di Tures en Italien)

J15 / J188 Rein in Taufers – Kasseler hutte
8 km     1000 m
  Kasseler hutte

J16 / J189 Kasseler hutte – Fennereg 3100m – Barmer hutte
13 km    1120 m Via ferrata au passage de la crête, puis dans la descente.
  Barmer hutte

J17 / J190 Barmer hutte – Jägerscharte 2870m – Halscharte 2550m – Santa Maddalena In Casies
 17 km    900 m
  Hotel Hofmann à Santa Maddalena in Casies

J18 / J191 Santa Maddalena in Casies – Gaishörndl 2615m – Bonner hutte
 14 km    1550 m
  Bonner hutte, magnifiquement situé face aux Tre Cime.

J19 / J192 Bonner hutte – Dobbiaco
9 km     0 m Etape de descente.
  Hôtels, ravitaillement à Dobbiaco, plein à notre passage. Nous avons passé la nuit à Appartment Wachtler à San Candido…soirée très animée!

 Long et magnifique trek en haute et moyenne montagne. Etapes glaciaires nécessitant matériel adapté et expérience (crampons, piolet, kit glacier, baudrier, corde) et matériel de via ferrata. La logistique est un peu complexe entre réservation des hébergements en haute saison et navettes véhicule, mais cela fait partie de l’aventure.

Attention, ne pas avoir le vertige pour certaines étapes. L’étape de Muller hutte à Magdeburger hutte est longue et délicate selon les conditions. Le refuge nous a accueilli avec une grappa!

 Les tracés et variantes en alpinisme ou en vtt peuvent s’inventer, que ce soit avec hébergement ou en autonomie sous tente, ou encore un parcours en sens inverse. Avis aux amateurs, n’hésitez pas à nous envoyer vos traces et commentaires. 

Partagez votre expérience sur ce parcours. Suggérez des variantes. Posez des questions. Echangez vos impressions. Faites part de vos envies. 

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