Après 25 ans de travail dans le tourisme, vous trouverez ici un point de synthèse et de réflexions sur l’utilisation de l’avion en regard de la transition écologique, sujet clivant particulièrement dans tous les débats.
Il est aujourd’hui prouvé que l’avion est une cause de pollution majeure, sans doute la pire rapportée à chaque passager. La décarbonation de l’aérien est un projet de recherche tout à fait nécessaire, mais très lointain et totalement incertain.
Dans la pépinière d’initiatives écologiques où j’interviens, la majorité des jeunes refuse de prendre désormais l’avion. Personnellement et connaissant les bienfaits et le progrès que constituent la mobilité aérienne, en termes d’échanges interculturels, économiques, ou simplement d’informations irremplaçables entre les humains, je suis pour une profonde refonte de nos usages de l’avion, mais pas pour l’arrêt de son utilisation à tous crins.
La sobriété qui est la première action à laquelle on doit penser, impose de maximiser les autres mobilités (train, voitures électriques) et de limiter ses déplacements (visioconférences, voyager moins souvent et si possible plus longtemps sur place). Certains tours opérateurs engagés commencent à proposer ce genre de réflexions et d’agir pour des voyages plus décarbonés ou plus longs. J’ai participé à la création d’une carte sur le sujet qui sert de référence. (https://cdn.helloasso.com/…/carte%20vip%20creative…)
C’est dire que l’on doit forcément limiter drastiquement nos déplacements en avion, en particulier moyen et long courrier.
Si j’étais encore à la tête de mon groupe de Tour Operator aujourd’hui, je commencerais par faire un bilan carbone des sociétés. Et j’imposerais sûrement des objectifs de décarbonation en relation avec l’accord de Paris, c’est-à-dire de réduire de 50% l’empreinte carbone des sociétés dans les 10 ans, soit 5% par an. C’est-à-dire moins de voyages long courrier (prévoir un stock annuel à ne pas dépasser) et compenser par plus de voyages décarbonés ou si inatteignable en chiffre d’affaires correspondant, de prévoir de pivoter vers d’autres activités moins carbonées. Mais je ne suis plus « aux affaires », même si j’en suis un témoin actif ! L’intérêt est au moins d’avoir une ligne de pensées et d’actions que je diffuse dans les PME où je suis aux comités de direction.
Concernant les vols, les calculateurs de rejet CO2 sont nombreux comme Myclimate, Bonpote, fondation Good Planet, etc. Par exemple, ils donnent un équivalent de CO2 rejeté dans l’atmosphère pour un aller-retour :
Paris Marrakech 1 tonne
Paris New York 2,5 tonnes
Paris Tahiti 6 tonnes.
Les connaissances récentes sur les trainées de condensation et le forçage radiatif qui en découle, nous apprennent que la réalité est plutôt du double ? C’est-à-dire pour un aller-retour en Polynésie 5 fois ce qui doit être l’objectif annuel d’un Français (2 tonnes) à l’horizon 2035 (accord de Paris) pour tenir les 1.5 à 2°C de réchauffement climatique (sans parler de la perte de biodiversité, de la limite des matériaux fossiles et minerais, et autres menaces qui sont liées). Aujourd’hui la trajectoire est sûrement à plus de 2°C ce qui prévoit d’ores et déjà un monde dangereux et imprévisible pour nos petits enfants !
Nombreux, dont les compagnies aériennes, sont ceux qui parlent de compensation carbone en plantant des arbres. Il s’agit typiquement de pure greenwashing, car les rejets d’un vol entrent directement dans l’atmosphère et seront là pour des milliers d’années, quand les arbres plantés mettront 10 à 20 ans pour commencer à absorber du CO2 dans une quantité assez indéterminée !!!
Il est beaucoup plus juste de parler de contribution écologique volontaire, un peu comme les crédits carbones pour les entreprises polluantes à condition que le prix de la tonne de CO2 soit juste (actuellement trop bas autour de 6€). En regardant les nombreux articles sur le sujet, la synthèse d’évaluation du prix que je peux avancer aujourd’hui, est autour de 25 €. Pour les vols de moins de 5h, il faudrait même en rajouter un peu, car le décollage et l’atterrissage comptent beaucoup dans les rejets. C’est-à-dire que pour les vols en exemple les contributions « acceptables » sont d’environ :
Paris Marrakech 25 à 30 €
Paris New York 60 €
Paris Tahiti 150 €
D’ailleurs on peut noter que les simples taxes non supportées par le kérosène ( ?) alors qu’elles le sont sur tous les autres carburants fossiles, ne nous mèneraient pas loin d’un tel surcoût.
Il serait avisé que toutes les compagnies et les tour-opérateurs proposent une telle contribution quasi obligatoire, mais sans doute je rêve !
Il se pose enfin le problème à qui donner cette contribution pour ceux qui prendraient la décision individuelle et rationnelle de participer aux efforts de décarbonation. Il existe beaucoup d’organismes, mais les actions sont souvent peu scientifiquement crédibles sur le plan de la décarbonation et se placent plutôt sur l’aide au développement. Prendre déjà des organismes labellisés par le gouvernement français est un minimum. Personnellement j’en retiens deux :
– https://stock-co2.com/ pour des projets utiles en France
– https://www.goodplanet.org/fr/ pour des projets plus internationaux
Voilà pour ce sujet que peu de personnes finalement connaissent. La réalité devrait malheureusement se charger de le rappeler aux jeunes générations dans les années à venir.
J’espère avoir été clair et réussi un peu à participer à ce chantier essentiel et vital de notre société dont le tourisme fait partie intégrante.
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